Que diriez-vous à une personne assise dans un train à côté de vous si vous saviez que son patrimoine s’élève à 50 millions d’euros ?

Si la valeur de votre patrimoine (ou celui de votre ménage) était égale au patrimoine moyen des Français (environ 250.000 €), vous parleriez à une personne qui est 200 fois plus riche que vous ! Pas de quoi partir en courant, mais ça peut néanmoins créer quelque gène chez vous, et une certaine mise à distance de sa part.

Maintenant, imaginez votre riche voisin (toujours 50 millions d’euros de patrimoine) rencontrant inopinément Bernard Arnaud, l’homme le plus riche de France (patrimoine de 146 milliards d’euros à l’été 2022), chez des amis communs.  Pour nous ce sont, presque banalement, deux personnes très riches qui se rencontrent.

Mais regardons les chiffres de plus près : votre voisin de train « pesait » 200 fois le montant de votre patrimoine. Et Bernard Arnaud par rapport à lui ? Quelle est la différence de « poids » entre le plus riche et le moins riche des deux hommes ? Elle est de 3000. Oui, Arnaud est 3000 fois plus riche que votre ancien voisin de train ! 150 milliards, cela fait 150 000 millions d’euros, soit 3000 fois plus que les bien modestes 50 millions de votre ancien voisin.

Comment peut-on imaginer la structure psychique d’un humain dont le patrimoine se compte en milliards d’euros ou de dollars ? Quelle image peut-il avoir de lui-même ? Et des autres humains – et en particulier des personnes ayant des revenus très bas ? Cet humain est-il heureux ? A-t-il la conscience tranquille ? Pense-t-il à la mort ? Qu’attend-il de la vie ? Qu’est-ce qui peut encore l’émouvoir ?

Comment se perçoit le détenteur d’un patrimoine de 50 millions d’euros quand il rencontre un autre humain 100 fois, 1000 fois, 3000 fois plus riche que lui ?

L’un et l’autre sont-ils conscients que, selon des études convergentes, la croissance des inégalités de richesse entre les classes sociales des pays conduit à la fragilisation des démocraties et à leur possible remplacement par des régimes populistes, autoritaires ou totalitaires ? L’évolution politique des États-Unis d’Amérique au cours des dernières décennies n’en est-elle pas une inquiétante illustration ?